Le Pléistocène (du grec ancien "pleistos", nombreux, et "kainos", récent) est la première époque géologique du Quaternaire et l'avant-dernière sur l'échelle des temps géologiques. Elle s'étend de 2,58 millions d'années à 11 700 ans avant le présent. Elle est précédée par le Pliocène et suivie par l'Holocène. Le Pléistocène est marqué par les cycles glaciaires. Sa fin correspond plus ou moins à celle du Paléolithique.
La dernière période glaciaire est une période de refroidissement global ou glaciation qui caractérise la fin du Pléistocène. Elle commence il y a environ 110 000 ans et se termine il y a environ 10 000 ans quand commence l'Holocène. Ses manifestations locales plus ou moins synchrones sont connues sous les noms de glaciation de Würm ou Würmien dans les Alpes, glaciation vistulienne ou Vistulien en Europe du Nord par exemple.
La mise en place de couches de glace épaisses de 3 à 4 km a provoqué une baisse du niveau de la mer d'environ 120 m il y a environ 20 000 ans. Certaines régions ont été ainsi exondées, comme la Béringie, située entre la Sibérie et l'Alaska, permettant à une mégafaune (mammouths, équidés, camélidés, cervidés) et aux populations humaines de chasseurs-cueilleurs de passer d'un continent à l'autre . De nombreux autres ponts terrestres apparaissaient favorisant ainsi l'extension de la population humaine. Les Alpes et l'Himalaya étaient couverts de glaciers et la limite de la couverture de glace de mer en hiver était située beaucoup plus au sud qu'aujourd'hui.
Les principales associations végétales (forêt tropicale dense, savane, steppe, forêt tempérée ou encore toundra) sont appelées des biomes.
Un biome (du grec bios = vie ), appelé aussi aire biotique , écozone ou écorégion , représente donc un territoire qui se caractérise par un climat, un milieu physique , un chimique et une vie spécifique .
La présence des espèces dépend de nombreux facteurs dont la température et l’humidité : ainsi, le peuplement végétal actuel est un bon indicateur du climat local. En effet, les espèces végétales sont adaptées à des conditions climatiques relativement précises.
D'après le principe d'actualité, on peut supposer que dans le passé, les lois régissant la répartition des végétaux étaient les mêmes qu'aujourd'hui. La végétation du passé (paléo-végétation) est donc utilisée comme indicateur du climat de l'époque (ou paléoclimat). En appliquant le principe d'actualité, on peut donc par l'étude des pollens piégés, reconstituer les biomes passés et donc enregistrer les variations de climat.
En effet, on trouve dans les sédiments des lacs et des tourbières (en milieu continental) des grains de pollen et des spores provenant des environs (<10 Km).
Les pollens sont les gamètes mâles des angiospermes et des gymnospermes. Le pollen possède une enveloppe extérieure, l'exine, qui résiste à la plupart des dégradations chimiques et biologiques. Cette enveloppe permet au pollen d'être dispersé dans l'environnement sans être abîmé et d'être fossilisé dans des milieux appauvris en oxygène comme les tourbières ou les fonds vaseux des lacs où ils se retrouvent mêlés aux sédiments.
L'observation d'un grain de pollen permet d'identifier l'espèce émettrice car la taille, la forme, l'ornementation de l'exine sont différentes d'une espèce (ou d'un groupe d'espèces) à l'autre. Chaque espèce végétale possède donc un pollen ou des spores caractéristiques qui permettent de l’identifier.
Chaque biome est caractérisé par la présence des pollens des espèces qui lui sont caractéristiques.
En identifiant puis en dénombrant les grains de pollens à différents niveaux d'une carotte sédimentaire, on peut faire une étude statistique de la fréquence de chaque type pollinique. En ne conservant que les espèces caractéristiques d'un biome spécifique, on peut établir un diagramme pollinique, témoin de l'évolution du peuplement local et donc des variations climatiques.
Ainsi par exemple, dans les Alpes en Savoie, des scientifiques ont foré le Lac Noir et en ont extrait une colonne de 8 mètres de tourbe (1 mètre correspondant à une durée de 1330 années en moyenne, soit une croissance moyenne de 7,5 cm par siècle).
La présence de pollens de différentes espèces végétales a été relevée tout au long de la colonne. Leur nombre peut être présenté sous forme de graphique selon différentes profondeurs.
D'après le graphique on peut observer :
un peuplement de hêtraie sapinière caractéristique d’un climat froid et humide
un peuplement de type Chênaie mixte (chêne, noisetier) caractéristique d'un climat humide et doux.
un peuplement peu arboré avec graminées et pins signalant un climat plus sec et plus froid.
Grâce au diagramme pollinique, on peut dater les changements climatiques en remontant le temps.
Vers 7 500 cm de profondeur, on remarque un passage d’un groupement graminées-pins à un groupement noisetier-chêne. La vitesse de formation de la tourbe est de 7.5 cm par siècle : le changement est daté donc de 10 000 ans environ. On passe alors d’un climat froid et sec à un climat tempéré et humide : il y a eu réchauffement climatique. C’est la fin du pléistocène et le début de l’Holocène.
Vers 4 500 cm de profondeur soit à environ 6000 ans on passe à une végétation de type hêtraie-sapinière caractéristique d'un climat tempéré à froid et humide : il y a eu un petit refroidissement climatique.
On peut alors comparer ces résultats avec d'autres diagrammes pour constater que le changement climatique de -10 000 ans se retrouve régulièrement avec plus ou moins de précision. En combinant les résultats obtenus en différents sites, on construit des cartes de répartition de la végétation à différentes époques. La comparaison de ces cartes révèle des changements climatiques.
Les glaciers lors de leur déplacement, provoquent la formation de moraines.
Une moraine est un amas de débris rocheux érodés et transportés par un glacier ou par une nappe de glace.
Les matériaux qui se détachent des versants de la montagne sont véhiculés par le glacier et déposés lorsque celui-ci fond, généralement à la même altitude, d'où un empilement rocheux. Les moraines sont parfois tellement épaisses, qu'avec l'érosion, des cheminées de fée se forment. La moraine contenant des sédiments de toutes tailles sous l'action de la pluie va s'éroder. Cependant, les blocs calcaires qu'elle contient protègent une partie de l'argile sous-jacente, ce qui fait qu'au bout d'un moment une colonne se dégage. Quand la colonne deviendra trop fragile pour supporter le poids du bloc, elle s'effondrera.
On observe parfois des blocs erratiques.
Un bloc erratique est, en géologie et en géomorphologie, un fragment de roche d'origine morainique qui a été déplacé par un glacier parfois sur de grandes distances.
Lors de la fonte du glacier, le bloc erratique est abandonné sur place.
L'avancée des glaciers se traduit par des stries sur les roches sous-jacentes. Ces stries sont en général nombreuses et parallèles et sont causées par les roches et graviers transportés par les glaciers qui polissent et rayent le sol. La plupart des stries actuellement visibles datent de la dernière glaciation ou du petit âge glaciaire du Moyen-âge.
Ainsi on retrouve la trace des glaciations récentes précédemment évoquées dans les ensembles sédimentaires mais aussi de glaciations plus anciennes.
Par exemple, les traces de glaciation ancienne (-250Ma) trouvées en Amérique et Afrique du Sud, Inde et Australie peuvent s'expliquer par la dérive des continents provoquée par la tectonique des plaques.
Durant la glaciation de Würm, l'art des chasseurs-cueilleurs de Cro-Magnon (de –35 000 à –8 000 ans environ) est fait d'animaux, d'humains et de signes géométriques. La vie quotidienne est rythmée par les saisons. Elles se reflètent assez souvent dans la morphologie et/ou le comportement des grands herbivores représentés.
La présence de certaines espèces traduit des épisodes froids : mammouths, rhinocéros laineux, ovibos, rennes, mégacéros.
D'autres témoignent de réchauffements : chevaux, bisons et surtout aurochs, cerfs et biches, bouquetins.
À la fin de la glaciation, la faune froide n'est plus représentée. Le grand art animalier des Cro-Magnons exprimé sur les parois des grottes (art pariétal) disparaît au profit d'un art des rochers de plein air (art rupestre), schématique et souvent narratif.
Alors que les données satellitaires ainsi que des capteurs au sol permettent de suivre l'évolution de la composition atmosphérique « en direct », les calottes glaciaires ayant emprisonné au cours de leur formation des bulles d'air nous permettent de suivre l'évolution de l'évolution de composition atmosphérique de leur époque.
En effet, les calottes glaciaires polaires sont formées à partir des précipitations neigeuses, qui emprisonnent des bulles de gaz correspondant à la composition de l'air au moment des précipitations.
La neige, perméable à l'air lors de son dépôt, se tasse progressivement sous son poids, enfermant ainsi l'air sous forme de bulles dans la glace. Ces bulles représentent environ 10% du volume des glaces. Lors de leur fermeture, vers 80 mètres de profondeur, elles sont définitivement isolées de l'atmosphère.
Cet enregistrement permet d'identifier les stades climatiques glaciaires et interglaciaires.
À Vostok, station basée en Antarctique, le 5 février 2012, les Russes ont pour la première fois, et après vingt-trois ans de tentative, réussi à percer les 3 769 mètres de la calotte glacière (neige glacée + glaces d’accrétion) pour atteindre directement la surface du lac Vostok.
Ainsi donc, une carotte de plus de trois kilomètres de long a été extraite. Elle retrace l'histoire des 420 000 dernières années. En 2004, le projet européen Epica a permis de remonter jusqu'à 800 000 ans en arrière en réalisant une carotte plus profonde à la station Concordia du plateau Antarctique.
Plusieurs paramètres sont mesurés et notamment les teneurs des bulles d'air en CO2 et CH4. Ces deux gaz à effet de serre séjournent assez longtemps dans l'atmosphère pour que la concentration de ces gaz s'homogénéise à la surface de la Terre. Il est donc possible de se servir de ces mesures pour comparer et dater relativement des profils obtenus dans différentes carottes de glace.
L’analyse révèle qu’à chaque période interglaciaire, le taux de CO2 atmosphérique était élevé et vice-versa.
L'oxygène est présent sous la forme de 3 isotopes :
L'utilisation la plus commune des isotopes de l'oxygène est basée sur le rapport entre les quantités de 18O et de 16O de la glace issue de carottages glaciaires ou de carbonates issus de forages sédimentaires.
En effet, le dioxygène est présent dans les molécules d’eau H2O et dans les molécules de carbonate de calcium CaCO3 des tests des foraminifères marins formés à partir d’éléments en solution et s’accumulant au fond des océans.
La composition isotopique d'un échantillon ('ech') est mesurée relativement à un standard ('std') de composition connue. On exprime classiquement cette composition comme une déviation relative à ce standard, par la notation géochimique « delta » dans laquelle les rapports isotopiques sont en nombres d'atomes (abondance isotopique).
Le standard utilisé est appelé « SMOW » qui signifie Standard Mean Oceanic Water et qui représente l’eau de mer à 25°C. Comme ce delta est petit on l'exprime en pour mille (plutôt qu'en pour cent).
Le 18O exprime donc l'enrichissement (variation positive) ou l'appauvrissement (variation négative) de l'échantillon par rapport au standard de référence. Cette formule nous permet de constater que plus la proportion d'isotope 18O est importante plus la valeur du delta est élevé.
L’isotope 18O comporte deux neutrons de plus que 16O, de sorte que la molécule d’eau qui le contient est plus lourde. Son évaporation nécessite donc plus d’énergie qu’une molécule contenant du 16O et à l’inverse sa condensation implique moins de perte d’énergie.
Le rapport 18O/16O de la vapeur est ainsi environ 1 % plus faible que celui de l'eau en équilibre.
Au cours de l'évaporation, l'16O plus léger passe donc préférentiellement dans la phase gazeuse et 18O reste donc préférentiellement dans la phase liquide, l'eau de mer. Lors des précipitations, l'18O passe majoritairement dans la phase liquide (la pluie). Cela a deux conséquences : le nuage restant s'appauvrit en 18O (le rapport 18O/16O du nuage diminue) et l'eau de mer s'enrichit en 18O (son rapport 18O/16O augmente). On observe alors une variation du 18O du nuage et de l'eau de mer.
Deux scenarios se dessinent alors.
En période glaciaire , les nuages se formant à l'équateur, précipitent sous des latitudes plus basses qu'en période chaude car ils rencontrent rapidement des masses d'air froid venus des pôles. Ainsi les nuages s'appauvrissent en 18O et l'océan s'enrichit en 18O et le rapport 18O/16O de l'océan augmente.
Les nuages arrivant aux pôles possèdent donc proportionnellement plus de 16O et la glace des pôles s'enrichit donc en 16O : le rapport 18O/16O de la glace diminue et le δ 18O est encore plus faible donc plus négatif.
Les précipitations restent au sol aux pôles car ceux-ci sont gelés. L'océan ayant perdu de l'eau, le niveau marin baisse ce qui concentre 18O. De plus, l'eau de mer ayant récupéré les précipitations proportionnellement enrichies en 18O voit son rapport 18O/16O augmenter : il n'y a pas de retour à la normale du δ 18O de la mer par manque d'apport en eau des pôles et on observe alors un delta 18O de la mer positive.
Les foraminifères de surface vont donc avoir un test plus riche en 18O. Quand ils meurent, leur test sédimente au fond de l’océan et forme une roche sédimentaire au δ 18O positif que l’on pourra récupérer aujourd’hui par carottage.
En période interglaciaire , il y a la fonte des calottes polaires. Le volume des océans augmente, l'eau de mer récupère le 16O des glaces et le rapport 18O/16O de l'océan diminue : la fonte des glaces a « dilué » la forte concentration de 18O résultant du précédent épisode froid. Donc le delta 18O de la mer revient à la normale. L'évaporation est forte mais il y a peu de précipitations aux latitudes basses car les nuages ne rencontrent pas de froid les forçant à précipiter.
Les nuages qui parviennent aux pôles sont donc proportionnellement plus riches en 18O. La glace s'appauvrit donc en 16O mais s'enrichit en 18O : le rapport 18O/16O des glaces augmente, donc le δ 18O des glaces se rapproche de zéro. Dans l'océan c'est l'inverse, le rapport 18O/16O de l'océan diminuant, le δ 18O des tests des foraminifères diminuant.
Ainsi, le δ18O des tests carbonatés évolue comme le δ18O des eaux océaniques, lui-même lié au volume de glace stocké à un moment donné dans les régions polaires.
Le δ18O est donc reflet du climat :
plus l'eau est froide, plus le 18O des tests carbonatés des foraminifères planctoniques (et donc des sédiments marins) augmente, plus le volume glaciaire augmente et le δ18O des glaces formées diminue.
plus l'eau est chaude, plus le 18O des tests carbonatés des foraminifères planctoniques (et donc des sédiments marins) diminue, plus le volume des glaces diminue et le δ18O des glaces formées augmente.
Les résultats obtenus par l'étude de la teneur en CO2 des bulles prisonnières de la glace de l'antarctique coïncident avec les résultats de l'étude sur le δ18O des tests carbonatés des foraminifères planctoniques comme le montrent les 2 documents suivants.
Attention l’image a volontairement été placée en miroir afin de faciliter la comparaison de l’axe des temps avec le document suivant.
Sur ce document sont représentés les écarts de température à la normale. Concernant le volume glaciaire, attention, la courbe représente l’évolution du niveau du glacier vers son point le plus bas. Ainsi une courbe haute indique une altitude basse du glacier et vice-versa.
On observe un anti-parallélisme des courbes.
À chaque hausse du δ18O des tests carbonatés des foraminifères planctoniques correspond une baisse de température et une augmentation du volume glaciaire, et vice versa.